28 janvier 2024

Ferdinand Ferber, un pionnier méconnu

C'est d'abord dans le rêve et à partir de l'œuvre de Jules Verne que naissent les idées lumineuses du jeune Ferdinand Ferber (1862-1909).
C’est ensuite, plus sérieusement, qu’il touche aux mathématiques et entre à Polytechnique. En tant que « autoentrepreneur » avant notre époque actuelle, il s’adonne à sa passion naissante les dimanches en dehors de ses activités militaires : le vol ! 

Issy-les-Moulineaux se souvient de ce capitaine "hors-sol" ! © A. Bétry

Il réalise des maquettes et se familiarise avec des matériaux légers fournis par le Centre d’aérostation militaire de Chalais-Meudon (aujourd’hui Office national d’études et de recherches aérospatiales), plus orienté sur le ballon que sur l’aviation embryonnaire. Il bricole (ci-dessous) et progresse dans la réalisation de planeurs.

Des débuts étonnants. © XDR

Wilbur et son frère Orville Wright, détenteurs du premier vol motorisé de l’histoire le 17 décembre 1903, prennent contact avec Ferdinand Ferber et de riches relations s’instaurent dans ce nouveau cercle des pionniers de l’air.
En 1904, notre aviateur français est confirmé comme adjoint au centre de Meudon malgré l’interdiction de construire tout avion civil dans l’enceinte.
Le 27 mai 1905, sur son avion n° 6, doté d’un moteur Buchet de six chevaux, Ferber accomplit la première expérience en air libre d’un aéroplane avec moteur à explosion en Europe.
Grâce aux travaux des deux frères Wright, américains d’origine, Ferdinand Ferber (ci-dessous) fait surface dans le monde du plus lourd que l’air.

Le capitaine Ferdinand Ferber (1862-1909). ©XDR

Le temps fait son œuvre et l’aéroplane n° 7, muni d’un moteur Peugeot, voit le jour. Lors d’essais celui-ci est détruit. Une bourrasque sur le n° 8 ne permet pas de fournir à Ferber l’optimisme nécessaire à la continuité des ses travaux. 
Enfin, en 1908, avec un moteur Levavasseur, des tests concluants sont effectués sur le polygone d’Issy-les-Moulineaux.
Mais le ministère de la Guerre reste insensible aux progrès de l’aviation jusqu’au vol de Blériot au-dessus de la Manche le 19 juillet 1909. 
Une déclaration de désapprobation du maréchal Foch énonce même, à la veille de la guerre de 1914 : « l’Aviation c’est du sport : pour l’Armée c’est zéro ». 
Fin 1908 le capitaine Ferber est mis en congé et nommé à la Ligue Nationale Aérienne comme commandant de l’École de Pilotes Aviateurs à Juvisy. Acquéreur d’un avion Voisin, il participe à des meetings et, à Boulogne-sur-Mer, le 22 septembre 1909, trouve la mort.       
Alain Bétry
 

23 janvier 2024

Des bornes kilométriques au patrimoine isséen

Odile, une de nos Historiennes, s'inquiétait sur l'avenir de la borne kilométrique située au 38, rue Aristide-Briand, en plein travaux. Tout va bien, La borne (ci-dessous), qui date du Second Empire ou du tout début de la Troisième République, a bien été mise à l'abri et sera, les travaux terminés, replacée.

La borne du 38, rue Aristide-Briand. © XDR

Ces bornes, dont une autre est localisée dans le parc de la Résistance (ci-dessous), ont une longue histoire et méritent de faire partie de notre patrimoine.

Borne du parc de la Résistance. ©XDR

Un peu d'histoire… C'est à partir de 1745, sous Louis XV, qu'apparaissent ces bornes en pierre ornées, à l'origine, d'une fleur de lys. Elles sont positionnées sur les voies royales, toutes les mille toises, soit une demi-lieue, soit 1 949 mètres. Issy, située entre Paris et Versailles, devait en posséder plusieurs… Mais, seules trois, à notre connaissance, sont connues. 

Alors, nous lançons un appel à tous les Isséens : si vous en repérez une au cours de vos promenades, n'hésitez pas à la prendre en photo, noter son emplacement et nous prévenir. Le Musée sera immédiatement averti. On compte sur vous.                                       
PCB

18 janvier 2024

L'imprimerie isséenne Je Sers

Issy-les-Moulineaux est la ville où il fait bon lire, disait-on dans un article en 2018 -http://www.historim.fr/2018/05/issy-les-moulineaux-la-ville-ou-il-fait.html. C'est aussi une cité qui abritait l'une des plus grandes imprimeries des années 1960, Néogravure -  http://www.historim.fr/2012/03/les-imprimeries-dissy.html. Mais n'oublions pas une autre imprimerie, beaucoup plus petite mais très importante pour le milieu protestant. Cette société s'appelait Je Sers, était domiciliée 132 Route de Clamart (actuelle avenue du Général-de-Gaulle).

Philémon Vincent.


C'est en 1922 qu'un certain Philémon Vincent (1860-1929), fondateur de l'église baptiste de l'avenue du Maine (ci-contre), décide de créer avec son ami Jean Caudron, Je Sers. Il s'agissait à la fois d'une librairie,  d'une maison d'édition et d'une imprimerie au service de l'évangélisation protestante. La famille Vincent était une véritable dynastie de pasteurs.

Malheureusement, la société anonyme, malgré ses actions au porteur (ci-dessous), fait faillite en 1932, à la suite notamment de la crise financière de 1929

Quelques mois plus tard, les locaux sont repris par la toute jeune Société française d'aviation nouvelle (la SFAN) qui y installe ses ateliers de construction de petits avions légers - http://www.historim.fr/2015/11/la-sfan-constructeur-davions-issy.html


Aujourd'hui, l'immeuble abrite des logements (ci-dessous).   PCB                            

132 avenue du Général-de-Gaulle, l'adresse de Je Sers,
puis de la SFAN. © XDR


12 janvier 2024

Architecture-Épisode 6 - Immeubles isséens au fil des siècles

Pendant des siècles, il n’y eut à Issy et aux Moulineaux que des demeures modestes et quelques belles propriétés du clergé et de la noblesse. L’évolution se fait au cours du XIXe siècle avec l’industrialisation et l’essor des transports. Le nombre d’habitants augmente et entraîne la construction d’immeubles, dont le nombre d’étages va croissant. 
Il fallut reconstruire après les dégâts subis lors de la Guerre de 1870/71 et de la Commune car peu de bâtiments ont été épargnés. La diversité architecturale est remarquable du XIXe siècle à nos jours : classicisme, Art nouveau, Art déco… jusqu’à l’architecture contemporaine. En 1882, l’abrogation de la législation architecturale du baron Haussmann favorise une plus grande diversité des façades et des volumes jusqu’à nos jours. D’ailleurs, l’architecture contemporaine est en pleine expansion dans les écoquartiers du Fort, du Val-de-Seine, du Cœur de Ville inauguré en 2022, et du futur quartier autour de la place Léon-Blum et de la future ligne 15. 

Immeubles Art Nouveau et néoclassiques
Quelques exemples d’immeubles originaux ont été choisis arbitrairement pour illustrer cette évolution spectaculaire au fil du temps. Commençons par la fin du XIXe siècle et la Belle Époque avec des monuments Art Nouveau ou néoclassiques.

Petit immeuble de 1889.
Au croisement des rues Horace-Vernet, de la Biscuiterie et de l’avenue de la République, on découvre un petit immeuble blanc de forme triangulaire et avec un arrondi, datant de 1889 (ci-dessus).
L’ancienne résidence Lasserre, dont l’entrée est avenue Jean-Jaurès, fut inaugurée en 1900 par le président de la République Émile Loubet (carte postale d’époque, ci-dessous). 

Hospice Lassere, carte postale 1900.
Les bâtiments en briques sur un ou deux étages entourent le jardin sur trois côtés. L’entrée pricipale est surmontée d’un petit clocher. La résidence Lasserre est maintenant
  transférée dans de nouveaux locaux rue Séverine et les anciens bâtiments transformés en copropriété résidentielle. 

Avec ses sept étages, l’immeuble à l’angle de l’avenue de la République et de la rue Horace-Vernet fut l’un des plus hauts de la ville. Ses résidents avaient le privilège de disposer d’un ascenseur électrique ! (ci-dessous, carte postale et photo actuelle). 

Aujourd'hui
Immeuble Belle Époque, avec ascenseur













Mais il faut signaler aussi les beaux immeubles Art nouveau des deux architectes isséens d’alors : E. Delaire et E. Puijalon, que l’on retrouve par exemple le long des rues Ernest-Renan et Général-Leclerc.

Immeubles Art déco

Dans l’entre-deux-guerres, l’Art déco prédomine pour les immeubles des rues Matrat-Voisembert et Branly par exemple. Les laboratoires pharmaceutiques Logeais, 71 avenue du Général-de-Gaulle, ont depuis été transformés en résidence (ci-dessous).


71, av. du Général-de-Gaulle, anciens laboratoires Logeais.

Après 1945, il faut citer la résidence Séverine entre les rues Séverine, Guynemer, Foucher-Lepelletier et Parmentier dont on vient de célébrer les soixante-dix ans (ci-dessous). 


Résidence Séverine, 1953.

L’architecte J. Delaire s’est inspiré de Le Corbusier pour l’immeuble principal sur pilotis, les fenêtres filantes pour éclairer les couloirs et les ascenseurs ne desservant qu’un étage sur deux. 




Il y eut de nombreuses constructions dans les Trente Glorieuses et les suivantes souvent sur des terrains d’anciennes usines. 


Depuis le début du XXe siècle, se sont développés les écoquartiers comme le Fort d’Issy totalement transformé. Les immeubles au centre sont de forme ovale comme une souris d’ordinateur alors que ceux de la périphérie ont des façades aux formes angulaires sur les bastions des fortifications qui ont été restaurées (ci-dessous). 

L'entrée du Fort et ses bastions.

Des immeubles arrondis à l'intérieur. © PCB
Dans le quartier Val-de-Seine, les tours Pont d’Issy Aquarel ont été imaginées par Françoise Raynaud en 2017/19 (ci-dessous). Leur gamme chromatique s’éclaircit au fur et à mesure des étages ; les façades sont rythmées par le décalage des balcons.

L'une des tours Pont d'Issy Aquarel.

Le nouvel écoquartier autour de la place Léon-Blum aura des immeubles construits par des « starchitectes » comme la Serre de Winy Maas. À découvrir dans un prochain épisode… mais il faudra 
attendre !
 Texte et photographies P. Maestracci

7 janvier 2024

Un Bréguet 941 à Issy-les-Moulineaux

Des avions, il y en a eu à Issy !
Louis Bréguet. © XDR
Aux dires des experts, et dès 1948, le pionnier de l’aviation et constructeur français Louis Bréguet (ci-contre) se spécialise dans la réalisation d’avions à décollage et atterrissages courts, appelés en langage avion ADAC, c'est-à-dire : développé sur le concept dit de « l’aile soufflée », cela consiste à utiliser le souffle des hélices de quatre mètres de diamètre, de quatre turbopropulseurs disposés sur le bord d’attaque le long des ailes, agissant sur des volets doubles le long de la totale envergure des ailes. Ces dernières, disposées également sur le bord d’attaque, et à la fois dirigées vers le bas, elles assurent la sustentation de l’aéronef.

Les essais débutés en souffleries en 1954 démontrent que les hélices fabriquées chez Ratier-Figeac doivent fonctionner simultanément. C’est ainsi que la collaboration d’Hispano-Suiza permet la mise au point d’un système de transmission had oc.

Vol d'un Bréguet 941 aux États-Unis. © XDR

21 mai 1958 est la date du vol inaugural ; les capacités ADAC sont bonnes : décollage en 190 mètres et atterrissage en 120 mètres.
Un accord de licence avec McDonnell Douglas est même signé.
En dépit de nombreux vols de démonstration, seulement quatre exemplaires seront construits pour l’armée de l’Air française. Manque de moyens ou de volonté politique ?

Posé du Bréguet 941 à Issy-les-Moulineaux. © XDR

Le 29 octobre 1963, le Bréguet 941 piloté par Bernard Witt, pilote d’essais Bréguet-Dassault (1926-2011), au terme d’une brillante tournée européenne de 6 500 km, se pose à Issy-les-Moulineaux (ci-dessus).                                        A. Bétry                                                                        

2 janvier 2024

Barbey d'Aurevilly à Issy ? À lire


Voici un livre plein de 
surprises, une enquête menée dans les rues d'Issy, sur les pas de Barbey d'Aurevilly (1808-1889), cet écrivain français, auteur de romans, de nouvelles et de poésies… l’un des protagonistes du roman d’Adrienne Weick, La septième diabolique, (Pocket 2023. Grand prix des enquêteurs).

Deux amis, Anatole Deck et Étienne, partent aujourd'hui à la recherche d’un manuscrit ignoré de Barbey d’Aurevilly qui se serait inspiré du drame vécu par une famille de Valognes (Manche). Il l’aurait écrit au printemps 1871 lorsque qu’il se trouvait caché dans un château après avoir fui la Commune de Paris. De quel château s'agit-il ?
Après de nombreuses péripéties, les deux enquêteurs identifient le château comme celui d’Issy, bombardé en 1871 (ci-dessous), puis démonté et reconstruit à la villa des Brillants à Meudon par Rodin au début du XXe siècle. Pour mémoire, Issy-les-Moulineaux ne prend son nom actuel qu’en 1893. 

Le château d'Issy incendié après les combats de la Commune de 1871.
Suivons les deux héros : ils « se retrouvèrent à la sortie du métro… Ils montent une petite rue qui grimpait vers les hauteurs de la ville. » Vous avez deviné… Ils sont arrivés à la station Mairie d’Issy de la ligne 12, proche de la rue Auguste Gervais (ci-dessous). 

La sortie du métro, station Mairie d'Issy. © PCB
Ils aperçoivent «  une étrange construction blanchie, arrondie, affublée d’un toit en pointe qui est accolée à un bâtiment moderne.. » C’est le Musée Français de la Carte à Jouer composé d’une partie de l’ancienne entrée du château et d’un musée contemporain (ci-dessous). 

Musée français de la carte à jouer.
L'ancien château, Galerie d'Histoire de la Ville.










Anatole et Étienne se glissent ensuite sous une fontaine dans la cour d’une propriété privée de la rue Berthelot  (ci-dessouset découvrent un bureau, aussi souterrain que poussiéreux, ainsi qu’un un long tunnel qu’ils parcourent en totalité. 

La fontaine. © PCB
Et… ils aboutissent dans « un abri rectangulaire, éclairé par quatre ouvertures grillagées. Au travers, ils distinguaient une large pièce d’eau » (ci-dessous).

Pièce d'eau du parc Henri Barbusse. © Alain Bétry










Ils sont dans un jardin public, le parc Henri Barbusse. Celui-ci est le vestige d’un grand parc long d’un kilomètre environ et large de 300 mètres appartenant aux princes de Conti au XVIIIe siècle. 
Et alors ? Pour connaître la fin de ce récit, il vous faudra lire ce livre palpitant ! Jusqu'à la dernière page !                              Texte et photos P. Maestracci