25 novembre 2021

Hamid : de Renault… à L'Harisssa. Épisode 1

L’Harissa, situé au 21 rue du Général-Leclerc (ci-dessous), est un restaurant de spécialités d'Afrique du Nord. Il occupe le rez-de-chaussée d’un petit hôtel de deux étages, qui devrait être démoli. Le nom du restaurant évoque irrésistiblement un condiment à base de piment vert, d’huile d’olive et de paprika. Mais ceux qui pensent que c’est une variante de tomato ketchup comprennent rapidement leur erreur ! L’harissa est un condiment originaire de Tunisie.

L'Harissa, 21 rue du Général-Leclerc, Issy. © P. Maestracci

Le maître des lieux s'appelle Hamid (ci-dessous). 
Sa vie ne fut pas facile mais il a su surmonter de nombreuses difficultés sans perdre son humanisme ni son humour. Retour sur ce long parcours. 
Sa famille est originaire de Kabylie. La fratrie compte sept enfants, cinq garçons et deux filles. Pour les nourrir, le père travaille comme ouvrier aux usines Renault à Boulogne-Billancourt mais meurt brutalement en 1956. Alors, la vie d'Hamid, jeune berger dans son pays natal, change radicalement. Il a 13 ans et grâce à Abdellah, son frère aîné, le voilà en France. Les conditions de vie sont rudes. 

De la Kabylie à la France
Hamid, derrière son bar. © P. Maestracci
Hamid partage une chambre avec ses deux frères, place Marcel-Sembat à Boulogne-Billancourt, dans un hôtel meublé appartenant à des blanchisseurs. Le chauffage est assuré par un poêle à charbon. Les lits sont dépliés chaque soir. Un robinet et les toilettes sont à l’extérieur. Un ticket permet une seule douche par semaine. Hamid fréquente quelque temps l’école de la rue Thiers, à Boulogne-Billancourt. Son institutrice, Mlle Labat, le prend dans son bureau pour le faire travailler et rattraper le temps perdu. Un autre élève, Xavier, partage son sandwich avec Hamid, lui qui n’a presque rien à manger. La maman de Xavier, Georgette, lui fournit ensuite de la nourriture, lui achète des souliers, des tickets de cinéma avec même la pièce pour l’ouvreuse. 

Son frère aîné le met en garde : « Tu es un ambassadeur des Kabyles… Respecte cette terre d’asile qui nous a reçus pour nous donner un travail et surtout un accès à la connaissance qui est la Liberté. » En 1968, la fratrie déménage à Saint-Cyr-l’École dans un appartement avec une vraie salle de bains. Le frère aîné en profite pour faire venir sa propre famille. Hamid commence à suivre des cours de karaté dans sa nouvelle commune de résidence, tout en poursuivant sa formation professionnelle.

Aux usines Renault
Il obtient ainsi son CAP d’ajusteur à 18 ans. La même année, il passe son permis de conduire ainsi qu’un diplôme d’enseignement du karaté. Il commence à travailler comme ajusteur-outilleur à la Régie Renault. Le transport se fait par car : départ de Saint-Cyr à 5 h 30 ; arrivée à l’usine à 7 h 15. 
Il rejoint son poste sur l’île Seguin (ci-dessous). Le travail cesse à 18 heures. Les jours de travail vont du lundi au vendredi avec un samedi sur deux, 45 heures par semaine. 

Renault sur l'île Seguin, Boulogne-Billancort. © XDR

Hamid affirme que Renault c’était : « une belle école de la ponctualité, du respect du travail bien fait et de l’engagement ». il y avait 40 000 ouvriers dans les usines (dont un quart sur l’île Seguin) pour construire les 4 L Renault dont 1 000 exemplaires sortaient des usines chaque jour. P. Maestracci

A suivre… le 29 novembre, 18 h.
 

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