6 novembre 2016

Mon quartier avant guerre - souvenirs de Ginette

Ginette évoque ici ses souvenirs d'enfance, ceux de ses parents et de ses grands-parents qui vécurent la Première Guerre mondiale. Une approche intéressante  en ce mois de novembre 2016.

La rue Hoche (ci-dessous) s’étend de l’Avenue de la République au boulevard Gallieni. Mes grands-parents y habitaient. Ma mère et moi sommes nées à Issy-les-Moulineaux. J’y suis restée depuis ma naissance jusqu’en 1980, soit plusieurs décennies. Dans les années 1930, la rue Hoche n’était guère fréquentée. Deux ou trois voitures par jour, il est vrai que la chaussée était constituée de gros pavés. De temps en temps, une dame d’un certain âge, venait nettoyer les caniveaux des deux côtés, sans jamais se plaindre. Une ou deux fois, durant la belle saison, un chevrier passait avec son troupeau et il se faisait un plaisir de traire une de ses chèvres pour remplir un bol de lait à la demande.

La rue Hoche, la cheminée de son lavoir  et ses maisons. 
Au début de la rue existait un lavoir où les ménagères pouvaient venir déposer leur sac de linge sale (le mardi si je me souviens bien), lesdits sacs étaient entassés dans une grande cuve avec de la lessive pour faire bouillir. Les dames revenaient le lendemain pour frotter leur linge… Ce lavoir a existé jusqu’à l’apparition des machines à laver dans les foyers. 
Les deux maisons locatives à 2 étages – tout à côté du lavoir – étaient une ancienne gendarmerie jusqu’au début des années 1900 (dixit mon grand-père qui habitait avec ma grand-mère au numéro 50 de la rue un modeste pavillon qu’ils avaient fait construire en 1913). De plus, il louait un jardin autour du Fort d’Issy, ce qui était alors possible.

L’Allée Hoche s’intercalait approximativement entre les numéros 39 et 41 de ladite rue Hoche. Cette allée – au départ sans nom – a été réservée uniquement aux piétons et aux cycles jusqu’à la fin des années 1930. Une barrière la séparait de la grande avenue qui s’appelait à l’époque Avenue de Verdun, en souvenir de la bataille de la guerre de 14/18. À l’emplacement du bureau de Poste actuel, sur un grand terrain, se trouvait la maison de M. Seron, entrepreneur en maçonnerie. Il avait construit au début des années 1900 un immeuble de trois étages qui portait le numéro 26 de ladite avenue et a participé à la construction du séminaire d’Issy, son nom est gravé sur une des murs arrières de l’édifice religieux. L’immeuble du numéro 28 a été construit plus tard, à l’emplacement d’un grand dépôt de matériels de construction dont le siège se trouvait rue Hoche. Du fait de la construction de ce nouvel immeuble, l’Allée a été ouverte à la circulation des voitures. En face de la future Poste se trouvait la propriété de MM. Puijalon, architectes de Père en Fils.

Avenue de Verdun : le tabac de la Mairie existe toujours.
Nous habitions mon mari et moi dans un petit immeuble situé dans l’allée Hoche, juste en face de ce qui s’appelait alors « La maison du Peuple ». Nous avons eu la peur de notre vie lors de l’attentat d’Issy en 1962 ! Toutes les vitres brisées, le plafond crevassé, le lustre tombé sur la table, la poussière sortie de dessous les plinthes…Dans les années 1930, face à cette allée, s’alignèrent de hauts immeubles modernes qui couvrirent toute la rue Branly. Les appartements de ces immeubles avaient tous …une salle de bains ! Rares à ce moment-là. Ils étaient habités (on le disait alors) par des gens aisés.

L’Avenue de Verdun (ci-dessus), ainsi baptisée en souvenir de la bataille de 1916, a pris en 1945 le nom d’Avenue Victor Cresson, l’ancien Maire, communiste, décédé en déportation. Sur l’Avenue de Verdun, s’ouvrit en 1930 La Maison du Peuple qui offrait une salle de réunions, une salle de gymnastique et une salle de théâtre. La compagnie l’Intime y jouait des pièces très appréciées des Isséens. Au mois de juillet, les dix meilleures élèves des classes des écoles publiques venaient y recevoir leur prix des mains de Monsieur le maire, Victor Cresson. Après la guerre et jusqu’en 1945, le samedi soir , la salle des spectacles se métamorphosait en salle de bal et les couples dansaient, dansaient jusqu’à 2 heures du matin ! ! ! C’est en cette période que la Maison du Peuple changea de nom, elle devint La Salle des Fêtes (ci-dessous).

La Salle des fêtes, actuel PACI.

Les Moulineaux. Ce lieu-dit se trouvait au bout de l’avenue de Verdun en direction de Meudon. Il s’y trouvait des moulins ainsi qu’une ferme où il était possible de déguster un bol de lait (souvenir de mes parents en 1919).

L’usine Caudron s’est installée (ci-dessous) en 1915 au numéro 52 de la rue Jean-Jacques Rousseau (devenue rue Guynemer depuis). Les frères Caudron, Gaston (décédé en 1915) et René, étaient des pionniers de l’aviation. Sous la direction de René Caudron, les ouvriers ne s’occupaient pas uniquement de l’entoilage des ailes mais fabriquaient les avions dans leur entier. C’est à bord de l’un de ces avions que Maryse Bastié a battu, entre autres, le record de la traversée de l’Atlantique en 1936. Mon grand-père et mon père y travaillaient jusqu’en 1935. L’usine Caudron a été alors rachetée par Renault et les ateliers transférés à Boulogne-Billancourt où ils ont subi les bombardements de l’aviation américaine en 1944. Du fait de ces destructions, les ateliers ont été répartis dans certaines petites usines de la Région parisienne. P. Maestracci et Ginette.


Les Caudron, industriels et aviateurs. Photos de l'une des 8 bornes de l'itinéraire "Berceau de l'Aviation",
inauguré lors des  Journées du patrimoine de 2016.




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