6 février 2014

Histoire des taxes communales d'Issy-les-Moulineaux

Alors que nous avons encore quelques jours pour payer le premier tiers, que la réforme des impôts occupe beaucoup le gouvernement, que la presse fait ses unes sur les taxes, toujours plus nombreuses, que doivent acquitter les Français, l'un de nos Historimiens revient sur l'histoire des communes, de leur gestion et des impôts redevables par les Isséens dans les années 1890.

Petit rappel de l'Histoire des communes.
Si les communes ont été créées le 17 décembre 1789, la « loi municipale » du 5 avril 1884 (ci-dessous) constitue l'acte fondateur de l'existence et de l'autonomie - relative - de gestion des communes vis-à-vis de l'Etat.

Selon cette loi, toutes les communes de France sont logées à la même enseigne ; et le rôle du Maire y est clairement défini. Outre ses fonctions de chef de l'exécutif de la commune, le représentant de l'Etat, au moins dans trois domaines : l'état civil, la police administrative et l'exécution des lois. Toutes les communes de France ont, depuis, la même structure : un organe délibérant (le Conseil municipal), un organe exécutif (le maire, chargé de l'exécution des décisions votées en Conseil) ; le Maire, qui est élu par le Conseil municipal, lui-même élu au suffrage universel pour une durée de 4 ans, passée à 6 ans en 1929. La loi de 1884 organise le budget de la commune en prévoyant deux sections : le budget ordinaire (fonctionnement) et le budget extraordinaire (investissement).

Les impôts locaux à Issy-les-Moulineaux dans les années 1890.
Jusqu'au début de 1895, les contribuables isséens versaient leurs impôts à la perception de Vanves. A la suite du départ à la retraite du percepteur de Vanves,  le Conseil municipal d'Issy obtient de l'autorité préfectorale qu'une recette propre à Issy-les-Moulineaux soit établie. Eugène Porte, déjà secrétaire général adjoint de la mairie, est nommé percepteur. Il se rend compte alors que tous les impôts locaux versés ne vont pas en totalité à la commune. Une partie est, chaque année, reversée à l'Etat. La quote part qui revenait à la commune d'Issy passa de 27,8% en 1884 à 19,6% en 1897 ! (De nos jours, c'est la dotation de l'Etat qui diminue, ce qui revient au même!).

L'un des marchés d'Issy, au début du XXe siècle.
Les commerçants - comme aujourd'hui - versent une taxe
 à la commune. Coll. Notre famille.
Pour remplacer ce manque à gagner, la commune perçoit d'autres taxes : sur les commerçants de marché (ils existent toujours! - à gauche), les concessions dans les cimetières, droits de voirie, d'octroi,  sur les chiens,  les voitures à cheval, les pianos,  les billards. Ces impôts sur la consommation frappent l'ensemble des familles.

Droits d'octroi. Il s'agit, à coup sûr, d'un impôt fructueux ! Il frappe l'entrée dans la commune des objets de consommation de bouche et des matériaux - en quelque sorte, des droits de douane ! Les bureaux d’octroi étaient installés Porte de Versailles, Boulevard du Lycée, Pont de Billancourt, Clos Montholon. Les droits s'élèvent, en 1889, de 0,10 franc pour 1kg de volaille, 0,50 pour 1kg de fruits, 66,50 pour 1 hectolitre d’alcool, etc.

L'octroi du Pont de Billancourt. Coll. privée.

Les prestations.  Ces survivances du droit féodal sont des corvées dues pour l'entretien des chemins vicinaux qui relevaient donc de la compétence de la commune et non de l’Etat. Chaque citoyen doit alors 4 journées de corvées par an. Mais il peut les racheter en versant une certaine somme d'argent à la mairie : la journée d'un homme a une valeur de 2 francs, celle d'un cheval 2,25  francs,  celle d'un âne 0,75  franc. Ces prestations ont fait l'objet d'une longue polémique entre la mairie et le séminaire dont le Supérieur estimait qu'il ne devait rien payer puisque les séminaristes étaient des habitants provisoires. En mairie, on déclara : « pas de privilège pour les gens qui peuvent payer! ». En 1895, le préfet donna raison au séminaire. La commune saisit le Conseil d'État. Finalement, le Conseil municipal supprima cette taxe en 1897.

Droits sur les chiens. Les propriétaires de chiens doivent payer une taxe annuelle. Leur compagnons sont classés en deux catégories : les chiens de garde (ou chien de seconde catégorie) et les chiens d'agrément (ou chien de première catégorie).

"Vous voilà maintenant passé citoyen, vous payez l'impôt… vous êtes même
devenu presque membre de ma famille, puisque nos deux noms,sont accolés sur votre collier"
Honoré Daumier, publié en 1856, dans le Charivari.
Cette taxe est instaurée, en 1855, par le baron Haussmann y trouvant un grand intérêt pour financer ses travaux à Paris (même si l'objectif initial de la taxe était de dissuader les citoyens d'avoir des chiens). Plus tard, on « affina » le dispositif en décrétant qu'étaient exonérés de la taxe « les chiens qui tétaient encore leur mère le 1er janvier de l'année » ! A Issy-les-Moulineaux, en 1880, on comptait 231 chiens de première catégorie et 307 de seconde catégorie. Les chiens doivent avoir la santé et la peau solide car cette taxe (nationale, bien entendu) ne fut supprimée qu'en 1971. Un impôt qui dure est un bon impôt ! Paul Drezet


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