Le Musée que nous avons eu le privilège de découvrir (voir rubrique Conférences/visites) regorge de trésors inestimables dont les costumes (ci-dessous) d'un ballet de Léonide Massine, sur une musique de Rossini : la Boutique fantasque.
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Le costume du roi de carreau, exposé au Musée français
de la carte à jouer. © A. Bétry |
Créé par
les Ballets russes de Serge de Diaghilev, il fut représenté pour la première fois à Londres, le 5 juin 1919. Comme souvent à cette époque-là, les costumes, rideaux de scène et décors sont imaginés par d'illustres artistes. Pour ce ballet en un acte,
André Derain (1880-1954), l'un des fondateurs du fauvisme, qui pour la première fois s'attelle à cette lourde tache, s'inspire des anciennes cartes à jouer, en pied, encore en usage au XIXe siècle. Il crée ainsi une dame de trèfle, une dame de coeur, un roi de pique et un
roi de carreau. Que l'on distingue
ci-dessous, en bas à droite, et que l'on peut admirer au Musée de la carte à jouer (
ci-dessus).
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Les croquis de Derain pour les costumes de
la Bourique fantasque (1919). Le roi de carreau
en bas à droite. National Gallery d'Australia. |
L'histoire se passe en France, à la fin du XIXe siècle, chez un fabricant d'automates qui présente au public ses dernières nouveautés. Les premiers clients sont des Américains qui assistent médusés à la tarentelle des poupées italiennes et la mazurka des cartes à jouer. Puis arrivent des Russes qui, eux, admirent la danse des cosaques, un numéro de chiens savants, et un cancan endiablé d'un couple de danseurs. Les Américains décident d'acheter le danseur, les Russes la danseuse. Ils viendront les prendre le lendemain. Mais les automates ne l'entendent pas ainsi et refusent que le couple de danseurs de cancan soit séparé et le cache. Lorsque les clients reviennent, les poupées ont disparu, les clients invectivent le vendeur mais les automates se rebellent et chassent les acheteurs. Les danseurs de cancan ont été sauvés.
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Les quatre danseurs de 1919 à Londres. De gauche à droite Zygmund Novak,
Lubov Tchernicheva, Vera Nemchinova, Maximilian Statkevitch. © BN.
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La représentation londonienne (
ci-dessus) est un succès et le ballet sera donné le 24 décembre 1919, à l'Opéra de Paris. Et sera encore joué jusque dans les années 1950. Les quatre costumes portés par les danseurs de la mazurka londonienne de 1919 : Lubov Tchernicheva (
la dame de trèfle), Zygmund Novak (
le roi de carreau), Vera Nemchinova
(la dame de coeur), Maximilian Statkevitch (
le roi de pique), vont être dispersés. Il faudra toute la détermination d'Agnès Barbier, la conservateur du Musée isséen, pour qu'ils soient acquis et enfin réunis dans ce lieu magique à l'honneur des cartes à jouer. Seul le roi de carreau est aujourd'hui exposé. Les trois autres sont en cours de restauration - un long et délicat travail. Qui mérite une bien une couronne, celle du roi de carreau !
PCB
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Couronne du roi de carreau,
Musée de la carte à jouer. © A. Bétry. |