15 août 2012

Course d'aviation Paris-Madrid 1911- épisode n° 4

Dernière étape Saint-Sébastien - Madrid. Ils sont toujours trois concurrents à prétendre enlever la course organisée par le Petit Parisien. Nous sommes le 25 mai. 

Roland Garros joue de malchance. A 10 kilomètres du départ, il heurte un poteau électrique de 5 000 volts, à Usurbil, une petite commune du pays basque,  près de Hernani. Ayant échappé de peu  à l'électrocution, il repart à Saint-Sébastien chercher une nouvelle hélice et prend l'air après que son mécanicien Leblanc ait réparé.

Réparation d'urgence sur l'avion de Roland Garros
par Leblanc sous la protection de la Guardia civil espagnole.
Peu après, c'est son moteur qui lâche. Pour éviter de se crasher contre une montagne, il pique droit dans le fond d'un ravin et se pose en catastrophe sur les galets du gave de Leizaran dans la petite ville d'Andoain. C'en est fini pour Garros (ci-dessous à droite).



Eugène Gilbert (ci-dessus à gauche), quant à lui,  doit s'arrêter à Alsasua, aux pieds des montagnes, en plein pays basque espagnol. C'en est fini aussi pour l'ancien mécanicien du pilote britannique Graham White.

Jules Védrines décolle à son tour. Direction le terrain de Getafe, aux portes de Madrid. Lui aussi, est victime d'un problème mécanique : la rupture d'une tige de soupape qui le contraint à atterrir à Quintanapalla, dans la province de Castille-Léon, non loin de Burgos. en provoquant un problème sur son stabilisateur. Il doit réparer, couche à Burgos et repart le lendemain matin. De très bonne heure.
A 8 heures 6 minutes, alors que l'orage menace, il traverse la sierra de Guadarrama et se pose sur le terrain désert de Getafe, où 10 000 personnes se pressaient la veille.

Le roi d'Espagne Alphonse XIII.


Le roi d'Espagne Alphonse XIII, en personne, est là pour le féliciter (à droite). Il a mis 37 heures 26 minutes 22 secondes pour relier Issy-les-Moulineaux à Getafe. Il remporte les 200 000 francs de prix offerts par le Petit Parisien. A 9 heures, le vent se lève et à 15 heures c'est un véritable ouragan qui s'abat sur le terrain, où se sont massés les Madrilènes. La tribune royale est démolie, les hangars, le poste téléphonique sont pulvérisés et il ne faut pas moins de 50 soldats cramponnés au fuselage pour empêcher le Morane victorieux de s'envoler… sans son pilote !


Le champagne du succès.
Interviewé quelque temps plus tard, Jules Védrines qui trinque à son arrivée (à gauche) commente ainsi sa victoire : "Je vous dirai un mot sur la façon dont je me dirige. Je crois avoir le sens de l’orientation très déve­loppé, car je n’ai fait aucune étude pouvant me le donner. De plus, je connais, grâce à mes randonnées pédestres, toutes les routes de France. Or, je prends seulement la carte des chemins de fer et je ne m’occupe que des lignes de voies ferrées. Je les prends au départ et je les suis. Lorsque j’arrive à une bifurca­tion, je consulte ma carte et je vois quel côté je dois prendre. Nombreux sont les pilotes qui se perdent. Jusqu’ici je ne me suis jamais trompé et je crois que c’est à ce système que je le dois. Je vogue à des hauteurs variant de 150 à 200 mètres de façon à suivre mon itinéraire avec précision et je me trouve dans l’air absolument comme si je consultais en automobile les poteaux indicateurs sur la route. Enfin, je m’abstiendrai de donner mon opinion sur la boussole : c’est un instrument dans lequel cer­tains ont la plus grande confiance. Quant à moi j’ai remarqué qu’il y avait là une aiguille qui tournait avec frénésie sans vous donner d’indications précieuses. J’évite de m’en servir. Telles sont les données sur lesquelles je me base pour me conduire. C’est grâce à elles que j’ai remporté Paris - Madrid. Du moment que je vous ai livré ce qui jusqu’ici était mon secret, il ne vous manque plus que d’acquérir un appareil pour venir me disputer les places d’honneur dans les courses à venir."
C'est ainsi que se termine (presque) notre feuilleton de l'été… qui vous a fait découvrir l'une des plus mythiques courses d'aviation. A suivre, le bilan cent ans plus tard…

Pour en savoir plus, n'hésitez pas à vous rendre à la Galerie d'Histoire de la Ville, au Musée de la carte à jouer, qui détient toute la collection des magazines La Vie au Grand Air (dont sont extraites toutes ces photos).





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