Il va tenir un journal - les Déportés de Fructidor - publié quelques années plus tard, après sa libération en 1799, grâce au coup d'Etat - encore un ! - du 18 Brumaire an VIII (9 novembre 1799) amenant Bonaparte au pouvoir. Et raconter son expérience dans un ouvrage d'ethnologue : Voyage forcé à Cayenne…
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«Le brouillard venait de se dissiper ; le soleil perçait les nuages, je marchais tête baissée, rêvant à la sensibilité de cette jeune femme que je n’avais jamais vue. Je foule une pelouse qui commence à poindre, des rigoles d’une eau argentine traversent par mille sinuosités une prairie déjà tapissée de verdure. À ma gauche, une montagne escarpée n’offre encore que les désastres de l’hiver ; les coteaux de vignes qui la couvrent sont nus ; les vieux pampres d’un noir grisâtre, amoncelés dans les ruisseaux, en arrêtent le cours et tamisent les eaux. Nous voilà à Issy ; j’y cherche en vain les ruines du fameux temple d’Isis ou Cérès. C’est à ce petit village que Paris doit son nom. Issy vient d’Isis et Paris de paratum ysi ou par isi, temple dédié à Isis ou égal à celui d’Isis. Le temps qui ronge les monuments et l’histoire, effacera de même ce moment de tristesse. Avec le temps, je me souviendrai d’avoir passé à Issy pour être déporté ; avec le temps, je reviendrai dans ce village avec autant de plaisir que j’ai de peine à le quitter. Le superbe parc qui l’embellit, appartenait à Mme de Rohan-Guéménée ; il fit envie à Robespierre ; il se l’appropria en faisant guillotiner la propriétaire. Quinze jours avant sa mort, ce tyran rêveur cherchait à dissiper son chagrin par une promenade dans le genre du Promeneur solitaire. Sa vue inspirait tant d’effroi que personne n’osait l’approcher, si ce n’est Collot-d’Herbois et Billaud-Varennes, associés de ses proscriptions. Les hommages de la multitude étaient un poids qui l’accablait. Pour venir à Issy, il se déroba à tous les témoins, excepté aux remords. Après avoir fait une promenade en bateau sur l’étang de ce parc, il dit à ses chers collègues : « Rien ne me plaît ici ; tout m’ennuie à la ville comme à la campagne ; je voudrais m’en retourner... » -Tout me plairait ici ; j’ai le trésor qui lui manquait, la paix d’une bonne conscience. Sans elle, le bonheur est du fiel, et l’adversité un enfer. "
Gageons qu'à son retour en France, enfin retiré de la politique, il eut l'occasion de retourner dans notre commune. PCB
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